« Fortifier contre tous assaulx » Psaumes et militances réformées, l’esprit et la règle (XVIe-XVIIIe siècle)
À la croisée de la liturgie, du rite, de l’hymnologie, les psaumes forment un objet historique multidimensionnel qui déborde l’histoire des pratiques confessionnelles. Ce donné religieux – au sens premier de connaissance offerte dans l’expérience –, relève de l’énoncé croyant et à ce titre constitue, en milieu protestant, un repère socialement construit à partir duquel se dressent (et d’emblée se débattent) des communautés confessantes en butte en France au catholicisme dominant. Leur chant, aussi matriciel et identifiant que stigmatisant, accompagne la naissance, les conquêtes et les vicissitudes des sociétés réformées qui revendiquent leur existence et se façonnent avec les psaumes, au point d’en symboliser aux yeux des adversaires le tout premier étendard et la bannière principale. Rendus à leur quintessence – au chant de combat qu’ils forment –, les psaumes sont le terrain d’une histoire sociale et religieuse féconde : la ressource biblique et l’énoncé déclaratif d’une minorité confessionnelle en survie qui trouve avec eux à se défendre et à célébrer sa foi. À partir des textes réformateurs, de la réglementation synodale et de la législation royale qui tentent d’en réguler les usages, cette enquête explore la valeur heuristique des psaumes, et cherche à identifier les raisons de leur centralité dans le calvinisme français. À la fois pièce maîtresse de la piété réformée et modalité de l’insoumission huguenote, les psaumes semblent une composante majeure de la militance protestante dont l’étude scrute les motifs et les déclinaisons, les principes et les règles. Elle vise à comprendre comment le chant des psaumes devient le mode mélodique de l’engagement religieux réformé, un repère communautairement constitué et confessionnellement clivant dans la France catholique de la période moderne.